Parkinson et CBD : quels résultats ?

Selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), plus de 8,5 millions de personnes étaient atteintes de la maladie de Parkinson en 2019. En 2030, le nombre de patients parkinsoniens pourrait augmenter de 56%. Les traitements actuels visent à soulager les symptômes, mais sont souvent associés à des effets secondaires indésirables. Ainsi, de plus en plus d’utilisateurs s’orientent vers des alternatives naturelles aux thérapies médicamenteuses. C’est par exemple le cas du cannabidiol (CBD), un composé dérivé de la plante de chanvre. Dans cet article, nous explorerons les preuves scientifiques sur les potentiels effets du CBD pour les personnes atteintes de Parkinson.

Qu’est-ce que la maladie de Parkinson ?

La maladie de Parkinson est une maladie neurologique progressive qui affecte les neurones dopaminergiques, situés dans une région spécifique du cerveau appelée la substantia nigra (substance noire).

Ces neurones sont responsables de la fabrication et de la libération de dopamine, un neurotransmetteur crucial pour le contrôle des mouvements automatiques du corps tels que les expressions faciales.

La maladie entraîne la dégénérescence progressive et la disparition de ces neurones, ce qui provoque une carence en dopamine dans le cerveau. Cela oblige les personnes atteintes de la maladie à réfléchir consciemment à leurs mouvements, alors qu’ils étaient auparavant effectués de manière automatique.

Les symptômes de la maladie de Parkinson comprennent des tremblements, des raideurs musculaires pouvant entraîner des douleurs, des mouvements lents et difficiles, une perte d’équilibre et de coordination, ainsi que des problèmes de parole et d’écriture. La maladie de Parkinson peut également entraîner des troubles du sommeil, de l’humeur et cognitifs (dépression, anxiété et démence).

La maladie de Parkinson est généralement traitée avec des médicaments qui augmentent les niveaux de dopamine dans le cerveau, ainsi que des thérapies non médicamenteuses telles que la physiothérapie et l’ergothérapie. Depuis quelques années, la recherche scientifique s’intéresse aussi au cannabidiol (CBD) en alternative aux thérapies médicamenteuses.

Qu’est-ce que le cannabidiol (CBD) ?

Le cannabidiol (CBD) est l’une des 120 molécules à ce jour identifiés dans la plante de chanvre, Cannabis Sativa L.. Le CBD est étudié depuis de nombreuses années dans le monde entier notamment dans le cadre thérapeutique. Ce composé actif naturel s’utilise sous différentes formes : huile sublinguale, fleur à vaporiser, soins à appliquer sur la peau.

Le CBD agit sur le système endocannabinoïde, un système biologique complexe présent dans le corps humain et chez de nombreux animaux. Il est impliqué dans la régulation de divers processus physiologiques, tels que la douleur, l’humeur, l’appétit, le sommeil, la réponse immunitaire, la cognition et la motricité.

Ce système est composé de récepteurs situés sur les cellules du corps appelés cannabinoïdes, ainsi que de molécules appelées endocannabinoïdes produites par le corps. Les endocannabinoïdes agissent comme des messagers chimiques et se lient aux récepteurs cannabinoïdes pour activer ou inhiber différentes fonctions biologiques. Le système endocannabinoïde est impliqué dans l’homéostasie, c’est-à-dire le maintien de l’équilibre et de la stabilité du corps.

Le CBD a la capacité de moduler l’activité des récepteurs cannabinoïdes et d’affecter la production et la dégradation des endocannabinoïdes. En se liant aux récepteurs cannabinoïdes, le CBD peut potentiellement avoir des effets sur divers processus physiologiques régulés par le système endocannabinoïde, tels que la douleur, l’humeur, le sommeil et l’inflammation.

Plus précisément, le CBD peut agir comme un agoniste partiel des récepteurs cannabinoïdes, ce qui signifie qu’il peut activer ces récepteurs mais pas à la même intensité que les endocannabinoïdes produits par le corps. Le CBD peut ainsi aider à réguler la réponse du système endocannabinoïde et à maintenir l’équilibre du corps.

Comment agit le CBD sur la maladie de Parkinson ?

Des preuves croissantes suggèrent que le système endocannabinoïde peut jouer un rôle dans la maladie de Parkinson.

Des études¹ ² ont montré que les niveaux d’endocannabinoïdes peuvent être altérés chez les patients atteints de la maladie de Parkinson, et que les récepteurs cannabinoïdes peuvent être affectés dans les zones du cerveau touchées par la maladie.

En outre, des études ont montré que l’activation des récepteurs cannabinoïdes pourrait avoir des effets bénéfiques sur certains symptômes de la maladie de Parkinson, tels que les tremblements et la rigidité musculaire. Cela est dû en partie à l’effet anti-inflammatoire et neuroprotecteur des cannabinoïdes.

Comme indiqué précédemment, le CBD a la capacité d’activer les récepteurs cannabinoïdes, ce qui pourrait expliquer pourquoi le CBD semble agir sur plusieurs symptômes de la maladie de Parkinson.

Existe-t-il des preuves scientifiques des effets bénéfiques du CBD sur la maladie de Parkinson ?

Plusieurs études³ se sont intéressées à l’action du CBD sur la maladie de Parkinson et ont montré qu’il pourrait avoir des effets bénéfiques sur le tremblement, la rigidité, la bradykinésie, la qualité du sommeil et la douleur. Dans ces études, le CBD a été observé comme ayant un effet neuroprotecteur, antioxydant et anti-inflammatoire dans les modèles de la maladie de Parkinson chez les animaux et les cultures cellulaires.

Ainsi, le Journal of Pyschopharmacology a publié une étude⁴ menée sur six patients présentant à la fois une psychose et les symptômes moteurs de la maladie de Parkinson. Le traitement de quatre semaines a commencé par une dose de 150 mg de CBD, qui, en fonction de la réponse clinique, a été augmentée de 150 mg chaque semaine. Toutes les évaluations ont été effectuées via des tests et des échelles d’évaluation clinique pour l’anxiété et la cognition, et il a été observé que le CBD réduisait la psychose de la maladie de Parkinson, tandis qu’aucune différence n’a été observée dans les processus moteurs.

Le même auteur a mené deux études⁵ parallèles évaluant les troubles moteurs de la maladie de Parkinson et le trouble du comportement en sommeil paradoxal (TCSP). Le TCSP se caractérise par des mouvements anormaux ou perturbateurs pendant le sommeil paradoxal (sommeil des rêves). L’effet du traitement au CBD sur le TCSP a été évalué chez un groupe de quatre patients présentant des symptômes caractéristiques de la maladie de Parkinson et des troubles du sommeil causés par la maladie. La dose de CBD était de 75 mg/jour et 300 mg/jour par patient, et les deux traitements ont duré six semaines. L’évaluation polysomnographique a révélé que le CBD atténuait le trouble du comportement en sommeil paradoxal.

Une autre étude⁶ publiée dans la revue scientifique Frontiers in Pharmacology s’est intéressée aux effets du CBD sur les troubles moteurs et cognitifs. Ainsi, des rats ont reçu quatre injections de CBD (0,5 ou 5 mg/kg) pendant 5 jours. Les jours 3 et 5, les animaux ont également reçu une injection de 1 mg/kg de réserpine afin de reproduire les déficits moteurs et cognitifs causés par la dyskinésie et la maladie de Parkinson. L’activité locomotrice, les mouvements de mastication vides et la catalepsie ont été évalués du jour 1 au jour 7. Les jours 8 et 9, les chercheurs ont analysé les performances des animaux au sein d’un labyrinthe en croix surélevée pour l’évaluation de l’apprentissage et de la mémoire. Le CBD (0,5mg/kg et 5 mg/kg) a atténué les comportements de catalepsie et mouvements oraux – mais pas la locomotion – induit par la réserpine. Le CBD (0,5 mg/kg) a également amélioré le déficit de mémoire induit par la réserpine dans l’exercice au sein du labyrinthe. Les données issues de cette étude indiquent ainsi que le CBD serait capable d’atténuer les troubles moteurs et cognitifs induits par la réserpine.

Il est important de noter que ces études sont limitées et que les résultats doivent être confirmés par des essais cliniques à plus grande échelle. De plus, les mécanismes d’action exacts du CBD dans la maladie de Parkinson ne sont pas encore bien compris et des recherches supplémentaires sont nécessaires pour définir s’il est réellement efficace sur l’ensemble des symptômes et dans quelle mesure (dosage, utilisation, etc.).

Sources :

¹Fernández-Ruiz, J., Moro, M. A., & Martínez-Orgado, J. (2015). Cannabinoids in neurodegenerative disorders and stroke/brain trauma: from preclinical models to clinical applications. Neurotherapeutics, 12(4), 793-806.

²Gubellini, P., & Picconi, B. (2014). Endocannabinoid signaling in Parkinson’s disease. Current opinion in pharmacology, 18, 54-61.

³Felipe Patricio, Alan Axel Morales-Andrade, Aleidy Patricio-Martínez, and Ilhuicamina Daniel Limón. Cannabidiol as a Therapeutic Target: Evidence of its Neuroprotective and Neuromodulatory Function in Parkinson’s Disease. Front Pharmacol. 2020; 11: 595635.

⁴Zuardi AW, Crippa JA, Hallak JE, et al. Cannabidiol for the treatment of psychosis in Parkinson’s disease. J Psychopharmacol. 2009;23(8):979-983.

⁵M H N Chagas 1, A L Eckeli, A W Zuardi, et al. Cannabidiol can improve complex sleep-related behaviours associated with rapid eye movement sleep behaviour disorder in Parkinson’s disease patients: a case series. J Clin Pharm Ther. 2014 Oct;39(5):564-6.

⁶Peres FF, Levin R, Suiama MA, et al. Cannabidiol prevents motor and cognitive impairments induced by reserpine in rats. Front Pharmacol. 2016;7:343.